Une rencontre foudroyante allait être le point de départ de cette nouvelle aventure, lorsque la bête a surgi des bois du Châtelard, fuyant visiblement la Suisse pour tenter de se réfugier en fraude du côté français. Si l'animal était trop agile pour nous, il faut reconnaître que la dissimulation sous un casque de chantier était pour le moins ratée. Bizarrement, après avoir atteint une altitude déjà vertigineuse, l'univers du granit rejoignait à nouveau celui du béton. L'échelle géologique était hélas contrecarrée par les constructions folles d'un docteur No bien décidé à arracher aux entrailles de la terre l'énergie nécessaire à ses exactions : houille blanche ? Uranium ? Garage à drônes atomiques ?
La tentation était grande d'aller y voir de plus près, mais nous nous fîmes violence et poursuivîmes notre ascension, entre soladanelles fraîchement écloses et rhododendrons, de dendrites et lapiaz en plissements herciniens puis en névés...
Le Docteur Moan'Ho tomba soudain en arrêt devant une empreinte. Certes, on notait bien la présence des... 5... doigts... Flûte. Crotte. Saperlipopette. Bon sang, c'est vrai, nos confrères parlaient plutôt de LIMON fossilisé. Ceci était donc un leurre, aussi grossier que le déguisement précédent. Les traces se trouvaient en effet plus loin ! Et là encore les pas des sauriens se dirigeaient vers la ligne de crête limitrophe.
C'en était trop. Dépités d'avoir été semés par des sauriens sans doute déjà cachés en France ou retournés aux cavernes de béton du Docteur No des Alpes, nous décidâmes d'attaquer la descente, bravant de vastes névés - et de ne pas nous venger sur la magnificence insolente des sauvages lys martagons au parfum quasi bestial.