De Branovo à Arbonne


<<< Des burins et des bogues... - accueil | <<< Bref parcours automnal |  >>> La carrière en son présent |
| 12 janvier 2005 | Commentaires bienvenus !  | En vrac - accueil |

Comment mes grands-parents maternels, Anna Gasparikova et Jan Kalina, sont-ils partis du Sud de la Slovaquie pour la forêt de Fontainebleau ? Tout d'abord, ce ne fut pas un départ unique, une fuite linéaire : en route vers l'ailleurs prometteur des Etats-Unis>1<, première destination envisagée, ils s'arrêtèrent d'abord en Lorraine - mines contre carrières ? Puis ils poursuivirent vers la Seine-et-Marne, retournèrent brièvement en Slovaquie, revinrent en France... leur choix ne s'établit pas plus à l'Ouest. Les carriers candidats à l'émigration, recrutés dans leur pays d'origine, signaient un contrat avant leur départ.


Branovo
Branovo>2< - Baromlak en hongrois - est un tout petit village, non loin de Nové Zamky et de la frontière hongroise, dans la région de Nitra. D'ailleurs, nés au début du XXe siècle, donc dans l'empire austro-hongrois, les enfants de la génération de mes grands-parents - du moins les garçons - ont été scolarisés en langue magyare ; tous étaient bilingues. Comme de nombreuses femmes de sa génération, ma grand-mère ne savait pas écrire.

On aperçoit ici les maisons traditionnelles, de structure oblongue et de plein-pied, rangées le long de l'unique rue. Les toits étaient de chaume et surtout d'ancelles de bois, les murs blancs ou de couleurs pastel, souvent ornés de frises tracées au rouleau, comme on en voyait encore il y a peu sur les maisons de ma grand-tante côté Gasparikova (Magda Melenova)>3< ou de mon grand-oncle côté Kalina (Laici). Elles ont pratiquement disparu, supplantées par des habitations confortables et spacieuses, sans caractère. Dans les années 1950, la rue était encore un chemin de terre, et les sols des maisons de terre-battue.

Anna et ses soeurs
Dans les années vingt du siècle dernier, les raisons de quitter la Slovaquie abondent : la famine>4< sévit dans le pays ; des familles pléthoriques vivent sur les terres, en l'occurrence riches, mais mal réparties. Voici Anna, ma grand-mère, entourée des femmes de sa famille et de leurs enfants ; la tribu est aussi conséquente chez les Kalina - on y perd le décompte des enfants ayant survécu ou pas...

Anna et sa soeur
Anna (à droite sur la photographie) est très courtisée, notamment par les frères Josef et Jan Kalina.

L'oncle Josef K.
Josef a cette chance d'être choisi de préférence à Jan comme apprenti chez un maître sculpteur : l'un restaurera des oeuvres, l'autre taillera des formes simples dans la matière brute...

Anna, Jan, Alexander
... mais c'est Jan qui épousera Anna.

Alexander, conçu en France et que ma grand-mère est retournée mettre au monde en Slovaquie, est l'aîné de quatre : mon cher oncle qui croyait avoir tout oublié du slovaque jusqu'à cette chanson lors du mariage de mon frère... Les conditions de vie sont telles que mon grand-père, d'une très grande rectitude, a épuisé les solutions pour faire vivre sa famille. Alors, le trio quitte de nouveau la Slovaquie pour la France.

>>> Suite : la carrière en son présent


<<< Des burins et des bogues... - accueil | <<< Bref parcours automnal |  >>> La carrière en son présent  |
| 12 janvier 2005 | Commentaires bienvenus !  | En vrac - accueil |

_______________________________

1|Une communauté assez importante de Slovaques est installée aux Etats-Unis, essentiellement dans les régions industrielles des grands lacs. On trouve sur le web une quantité de documents sur le sujet. Notamment celui-ci, assez émouvant, sur le site de la Library of Congress : >>> FEDOR, Helen : The Slovaks in America.
2| Branovo malgré sa modestie, dispose aujourd'hui d'un site web ! >>> http://www.branovo.sk/
3| La frise est assez visible, verticale, sur cette photo (août 1992) >>> Devant la maison de la Teta Magda. >>> Zoom sur la fenêtre et la frise.
4| L'effondrement industriel, dans cette contrée déjà peu industrialisée, entraîne un reflux des paysans vers des terres qui ne suffisent plus à cette population, d'autant plus que l'instauration des quotas freine l'immigration vers les Etats-Unis (Cf. Liptak, Lubomir : Petite histoire de la Slovaquie, Paris, 1996.)