Titou et la forêt bavarde


Mi-pente mi-raison | 31 décembre 2005 | Ecrivez-moi : anne-so@samizdat.net | En Haaaaaut...! |

Légende

- Ce conte est conçu pour être monté en spectacle de marionnettes. # : son.  >>> : gestuelle ou début lecture

Discographie

. Musiques :
Intro. : Iva Bittova et F. Nejblizsi, "Pasli ovce valasi", in Kolednice.
Après le vent triste, suite de la lecture : Iva Bittova, "Vzpominka", in Bielo inferno.
Apparition de Fujarko : Ferenc Santa junior, "Hora" de Bessarabie.
Conclusion : Iva Bittova, "Zelena je louka", in Kolednice.
. Pour les bruitages, on trouve aisément en médiathèque des disques avec des sons de vent (de type tempête en hiver, puis tempête dans une forêt de feuillus pour un son plus "sympathique"), et "d'apparitions magiques" (science-fiction avec les thèmes de froid, désert intergalactique etc.).
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# musique 1 d'intro


Voix 1 >>> lire intro :
Titou est haut comme trois pommes - euh... comme deux pommes et demi. Il vit tout en bas dans la vallée, dans une toute, toute petite maison, comme un lutin. En fait, sa maison est dans un jardin : il vit dans un pot de fleur ! >>>apparition Titou puis pot de fleur. Titou salue, et re-disparaît

Voix 1 >>> lire suite intro. # Bruit vent
Cette année-là, l'automne avait été très sombre, plein de gadoue ; les arbres avaient perdu très tôt toutes leurs feuilles, laissant leurs troncs tout noirs sous la pluie froide. Cet automne n'en finissait pas de s'étirer jusqu'à l'hiver, et même les champignons s'étaient cachés sous terre depuis longtemps - et les petites bêtes aussi. Les plus grandes s'étaient enrhumées avec tout ce froid et toute cette pluie. Le pire, ce furent les grands vents gris grognants qui arrivèrent très brutalement, secouèrent les arbres tellement fort, qu'ils en eurent mal au tronc et aux branches. Certains même, sortirent de terre, les racines arrachées. Et puis ces grands vents gris racontaient des histoires qui venaient de loin, des histoires pas marrantes du tout, qu'ils rapportaient des endroits qu'ils avaient traversés.

Bref - on manquait de soleil, la nature manquait de soleil, et dans les coeurs aussi on manquait de soleil. Que faire ?

[Fin lecture Voix 1 . Suite Voix 2]

Une nuit, Titou alla se coucher >>>, un peu tracassé. Il n'avait pas très envie de dormir, mais il se dit :  "Peut-être que la nuit m'apportera un rêve et que dans ce rêve il y aura une idée". Donc il s'endormit. >>>

Soudain, il sentit quelque chose qui lui chatouillait la joue pendant qu'il dormait >>> Il ouvrit les yeux, et - hooooo ! c'était un rayon de lune malin qui avait réussi à se glisser entre les volets de la chambre.

Titou sortit, et là, ô merveille ! Le visage rond de la lune brillait dans la nuit
>>>- mais la nuit n'était plus si noire que ça. Il avait neigé et tout était blanc, feutré, doux comme du coton, silencieux sous le ciel noir. Des étoiles brillaient, et en-dessous, la terre répondait en scintillant aussi avec la neige.

>>> # "Hop ! saperlipop' !" [arrivée soudaine de Fujarko le folaton* en faisant des culbutes et des grimaces]
- Salut, Titou ! Je me présente, Fujarko le folaton foufou farceur. Je veille sur les jardins de ce côté-ci de la montagne. Mais je viens des Tatras, c'est quelque part... par là... enfin loin, quoi.
- ça alors... moi c'est Titou.
- Bon. Titou, je sais que tu es triste, parce-qu'il n'y a presque plus de soleil en ce moment, mais je peux t'aider. Je sais où-se-trouve-la-so-lu-tion !
- Pas possible ?
- Si ! Les arbres nous expliqueront quoi faire, ils connaissent la formule. Suis-moi dans la forêt, nous allons leur demander.
- Tu es sûr ?
Titou était vaguement inquiet, il hésitait à suivre comme ça un folaton farceur. Mais d'un autre côté il était sincère : après tout il reconnaissait lui-même être farceur... et il l'avait vraiment vu de ses yeux vu descendre sur son rayon de lune... il avait aussi la peau couverte d'un pelage soyeux, de grandes oreilles soyeuses aussi, et un regard vraiment gentil.

Ils commencèrent à marcher tous les deux, dans la neige. Ils arrivèrent très vite dans la forêt, car elle commençait juste derrière la maison de Titou. Cette forêt-là, Titou la connaissait très bien. Mais là, il y avait quelque chose d'un peu étrange. >>> sortie des arbres
D'abord, les arbres étaient comme enveloppés d'une belle cape blanche, comme un duvet très épais mais léger. Et puis, Titou eut l'impression que le grand sapin, là... venait de lui faire signe de la branche. Et puis un autre sapin aussi, mais oui !
Un peu plus loin, c'était le merisier qui avait des fleurs, qui apparaissaient en grappes blanches sur le blanc de la neige.
- C'est bien bizarre, Fujarko, des fleurs comme ça, au début de l'hiver ?!
- Pfff ! Tu as encore des choses à découvrir, Titou. Cela n'est rien, c'est normal, une nuit comme ça...
- Une nuit comme ça ? Ha ! Le bouleau, je suis sûr qu'il m'a fait coucou !
- Tssst-tssst-tsss, tu verras, plus loin.

Ils continuèrent à marcher.
>>> un petit sapin les suit en cachette. Il s'arrête quand ils s'arrêtent etc.
Au bout d'un moment, ils arrivèrent dans une partie de la forêt que Titou connaissait d'habitude, une belle clairière. Elle lui était familière, mais il la reconnaissait sans vraiment la reconnaître. La neige recouvrait presque tout, tout était arrondi sous le tapis de neige. On apercevait des fleurs ça et là dans les branches, et même quelques grappes de fruits rouges sur les sorbiers, qui brillaient comme des boules de Noël. Par terre, des roses de Noël d'un joli vert très pâle pointaient à travers la neige et balançaient doucement leur tête.
Titou en ramassa une délicatement, avec ses racines, il la mit dans un peu de mousse pour la protéger, et la glissa dans sa poche.

# + murmures voix 1 et 2 : "pssssPssss... Fujarko... Titou...hihihihi!"
A présent, on entendait carrément murmurer les arbres.
Les arbres bruissaient et parlaient de plus en plus fort. >>>
Soudain, Titou vit sur le sol, à ses pieds, un tout petit cristal. Qu'il était joli ! Il brillait tellement, qu'on aurait dit un minuscule diamant qui lui faisait un clin d'oeil.
Il hésita puis le ramassa et le rangea dans sa poche.
Fujarko se racla la gorge :
- Rrrrrrrreuh - rkrheum ! Messieurs les arbres, je vous demande une petite minute d'attention s'il vous plaît ! Voici Titou : pouvez-vous, s'il vous plaît, lui dire la formule qui fait revenir le soleil ?
# plus fort
Alors le bruissement s'amplifia. Tous les arbres parlaient en même temps. C'était assez beau, d'ailleurs. Comme le chant d'une immense chorale... Titou l'aurait bien emporté dans sa poche pour l'écouter encore, plus tard, mais ce n'était pas possible. Alors il le mit simplement dans sa mémoire. Malgré tout, il était bien difficile de comprendre les mots dans tout ce bazar ! Titou n'y comprenait rien.

Avec Fujarko, ils commençaient à se fatiguer. Ils s'assirent pour réfléchir, sous un sapin au sec, pour ne pas avoir les fesses dans la neige... >>>
# féérie
Soudain une clarté se fit. Les arbres se calmèrent. Sur un rayon multicolore descendit un petit nuage, et dessous, une fée faisait de la balançoire.
- Bonjour ! Je suis la fée Euphrasine. Ecoute, petit, laisse donc tomber tous ces zozos ! Ils sont gentils, mais tu n'es pas sorti de l'auberge avec eux. Moi je vais te conduire au point magique, là où se trouvera la réponse à ton problème.
- Youpiiiii ! dit Fujarko
- Chouette ! dit Titou
- Attention, le chemin sera un peu long. La pente sera raide, mais je serai toujours là pour t'aider et t'encourager, et cela vaut la peine de suivre ce chemin.
Ils se mirent donc à marcher, marcher, marcher, et à monter sur le sentier enneigé, monter, monter, monter. Entre les sapins les étoiles envoyaient des milliers de clins d'oeil. L'air faisait des petits nuages en sortant de leur bouche, tellement il faisait froid. Enfin, les arbres commencèrent à s'éclaircir, il y en avait de moins en moins. Des bouleaux et des vernes remplacèrent les sapins, puis des mélèzes et quelques sorbiers avec des fruits rouges que les oiseaux avaient oublié de manger, puis quelques pins arolles et puis plus grand chose - enfin si : des buissons de genévrier, de myrtilles et de rhododendrons qui formaient plein de bosses sous la neige, comme des moutons au milieu des bosses un peu plus grosses des rochers de la moraine.

La fée s'arrêta enfin :
- Maintenant, Titou, retourne toi et regarde !
C'était magnifique ! On était à présent tout en haut de la montagne, et le ciel était un petit peu plus clair : bleu foncé avec comme un trait doré qui commençait à se dessiner autour des chaînes de montagnes, en face.
Euphrasine descendit, tout près de Titou :
- Regarde, ssssssschut ! Regarde bien !
Le ciel était devenu de plus en plus pâle, bleu presque blanc avec maintenant du rose autour de la silhouette des montagnes en face.
Le soleil apparut soudain, quelques rayons qui filtraient entre les sommets des montagnes, puis tout entier ! le soleil était revenu !
- Vois, dit Euphrasine, le soleil ne disparaît jamais complètement ! Cette nuit était la nuit de Noël, et à partir de maintenant, le soleil restera avec nous de plus en plus longtemps chaque jour. Et si tu le veux très fort dans ton coeur, il y aura toujours un peu de ce soleil !

Titou mit la main dans sa poche. Il montra à Euphrasine ses petits trésors.
- Et bien tu vois, Titou, tu as encore deux autres trésors, dans ton coeur : le bonjour du soleil, qui recommencera toujours, et le chant des arbres dans la forêt, même s'il est mystérieux. Et je vais encore te donner un autre trésor. Tu vois là-bas, le village sous la montagne, à côté ?
Elle le lui montrait mais il était bien difficile de l'apercevoir.
- Eh bien là-bas est ton village, tout petit, minuscule, tellement il est loin. Et je sais que là-bas ta maman pense à toi ! Et là-bas, retourne toi, sur l'autre montagne, c'est ton papa.
- Mais ils sont petits vu d'ici, je n'arrive pas à les voir... ou à peine...
- Oui, mais fais-leur signe de la main, ils savent bien que tu penses à eux ! Comme tous les gens qui t'aiment, ils sont comme des petits soleils qui brillent dans ton coeur et tu es comme un petit soleil dans leur coeur !

Il faisait clair à présent. Tout était silencieux et lumineux, on entendait seulement parfois le glissement d'un voile de neige argenté, ou le froufrou du vol fluide d'un choucas déjà réveillé, qui commençait à jouer dans le vent du matin.

Euphrasine :
- Je vais te confier Doucaillou : c'est le frère jumeau de mon nuage, un nuage fossilisé. Il va te raccompagner chez toi, afin que tu ne te perdes pas.
Tout heureux, Titou se mit en marche derrière Doucaillou...

>>> # Musique conclusion
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Ane-Sot l'ange pour Yanko, décembre 2005.