BONITOS BIGOTES

Des marges de l'esthétique aux confins de l'exploration scientifique et encore bien au-delà histoire de se gausser un peu tout en finesse sur un sujet pourtant galvaudé



Préambule

Pacha Guilty osa jadis commettre cette maxime 1 :


"L'existence d'une femme se résume à une incessante lutte contre le poil"

- ou quelque chose d'approchant (pareille assertion mérite-t-elle seulement vérification ?). Mais ces paroles appartiennent à un siècle depuis longtemps révolu. Pourtant, aujourd'hui encore, malgré la pléthore de substances et outils les plus divers dédiés à l'éradication du poil, les débats font toujours rage sur la question, sans qu'une réponse précise émerge de cette cacophonie.
C'est pourquoi nous étudierons ici, non point la meilleure méthode pour se débarrasser des poils, problématique totalement dépassée, mais la possibilité de se débarrasser du problème ; bref, quel process élusif sera-t-il le plus probant ?

Résumé

. Est-ce que l'on peut, dans le contexte post-post-moderne qui est le nôtre, encore trouver quelque efficacité dans les produits proposés sur le marché ?
. Dans le doute, qu'est-ce qui fait le moins mal ?
. Est-il possible de sortir du paradigme douleur/coût vénal/efficacité (et quid de l'efficacité ?) et de l'antagonisme beauté socialement reconnue/mocheté, caractère hors normes des poils chez la femme qui décide d'assumer sa pilosité ?

Protocole


Phase 1 : substance décolorante A ; le moindre effort / peut-être plus de risque, celui-ci étant ici lié à une mise en oeuvre chimique
Phase 2 : la réaction chimique au produit étant soumise à des variables personnelles, test de divers produits analogues jusqu'à obtension d'un résultat.
Phase 3 : comparaison avec d'autres types d'action (efficacité, inocuité).

Toutes les opérations seront effectuées en suivant le mode d'emploi, lorsque celui-ci est fourni en standard avec le produit. Dans un deuxième temps, des adaptations progressives sont permises lorsque le processus n'a pas abouti par la méthode recommandée par le fabriquant. Seule la zone moustachidienne est étudiée. Un lavage avec un produit neutre suivie d'une lotion calmante est effectué entre chaque process. Un sédatif alcoolisé 2 est pris entre chaque process, dès lors que l'on a pu constater l'apparition d'une douleur (le terme "douleur" étant ici compris dans son aception la plus large.)


Compte-rendu de l'expérimentation

Phase 1 : substance décolorante A ;

Le sujet avant l'expérimentation>>>
Mise en oeuvre complexe. Le produit ne s'emploie pas dans l'état où on se le procure, mais il nécessite :
. le mélange d'une substance µ, de type émulsion d'eau oxygénée (taux de concentration non spécifiée) dans un corps mousseux rappelant étrangement la mousse polyuréthane expansive 3, avec une substance µ' amoniaquée.
Matériel mis en oeuvre  Mélange
. la parfaite synchronisation entre la fin du mélange et l'application, sinon risque d'éventation.
Application
. un temps de latence après application sur la zone moustachidienne précisément de ... 10 à 15 mn. Les 5 mn en sus pouvant être cause de brûlures si le sujet se situait dans la zone d'efficacité à 10 mn.
Application  Application  Application
On observe parfaitement sur la photo un phénomène d'écaillure du produit, qui sèche sur la peau entre T0 + 13' et T0 + 15'.

Phase 2 : le résultat étant imparfait, test de divers produits analogues jusqu'à obtension d'un résultat

Produits utilisés : Joulhaine, Colle-Ane, Intoxa, Nerf, Bond-et-piles. Si le résultat est analogue au plan clinique (picotement confirmé par un accroissement sensible au fil des expérimentations, moustache toujours vivace), on note une évolution tout à fait fascinante au plan chromatique.
gamme chromatique  gamme chromatique  gamme chromatique  gamme chromatique  gamme chromatique  
La pilosité apparaît enfin décolorée, mais toujours visible et lustrée, dénotant un style vinking assez marqué. Le manque de recherche dans le peignage et la raideur du retombé, enfin, le nombre de dendrites affleurant, tendent à indiquer une appartenance à la horde de Rollon (Hrôlfr, 845 - 931) 4. Le carbone 14 devrait confirmer la datation (test en cours sur un échantillon prélevé à l'issue de l'expérience). Hrôlfr gamme chromatique
Après un temps de latence sans réaction, une réaction en chaîne exosynchrochromatique conduit à une subite poussée pileuse.

Phase 3 : comparaison avec d'autres types d'action (efficacité, inocuité)

Masticoplastie extirpatoire souple à base acrylique appliquée à l'aide d'un pistolet à mécanisme manuel à poussée posivectorielle.
Matériel et application sur le sujet. La réticence de ce dernier suggère le recours à une solution éthylique dosée à 40%.
Outch  Outch  Outch
Pour neurologiquement éprouvante qu'elle pût paraître, cette méthode demeure la moins douloureuse. C'est aussi la moins efficace, puisque non seulement le temps de repos avant séchage complet du produit est de "1/2 h en surface, plusieurs heures à coeur", mais encore elle n'arrache rien.
D'autre part, elle implique l'intervention d'un assistant, le pistolet étant difficile à utiliser avec précision sur soi-même.

Colle
Un astucieux détournement de la colle-aux-femmes de son usage musical premier, a finalement révélé les meilleurs résultats, malgré de légers aleas lors de l'application des bandes - le plus délicat étant le report de la colle-aux-fannes fondue sur les bandes de film plastique sans le plastique fonde.
Outch  Outch  Outch  Outch
La parfaite adhérence du produit permet un usage extensif et économique que ne renieront pas les écologistes : on obtient par simple filtrage, d'une part de la collophane, d'autre part des crins dont on peut faire des archets.
La phase extirpatoire ne présente aucune difficulté particulière.



Conclusion

Dans tous les cas de figure, ça fait mal. Au delà des effets intéressants en pleine lumière que permet la méthode chimique, le laboratoire préconisera donc la méthode la plus radicale, qui débarrasse le sujet de son attribut moustachidien pour plusieurs semaines : la cire. Ou bien l'élision par l'alcool (traitement par voie interne). Ou mieux encore, seule méthode indolore et absolue, le floutage numérique - démontré à votre insu sur plusieurs des photographies qui précèdent.




***Appel à contribution***

En vue d'une prochaine conférence, nous étudierons, testerons, et relaterons un autre type d'auto-intervention esthétique : comment développer le volume de la poitrine ?
Vive le silicone ! [ph. par Laurent]




| l'Ane-Sot | 19/02/2004 | En Vrac |




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Références bilbiliograffiques

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NOTES


1| Maxime : du latin "maximum" ; émission péremptoire et réductrice, en un mot, totalement exagérée.

2| Alcool : agit tant sur la douleur physique que mentale.

3| La mousse polyuréthane expansive a fait l'objet d'un test précédent, que la communauté scientifique situe dans la préhistoire du domaine, s'agissant d'expérimenter l'épilation sur l'homme, à l'aide d'un produit initialement destiné à un usage différent. Le process consistait à appliquer sans protection ni décomposition en phases méthodiques, le plus vite possible, une quantité à coup-sûr suffisante de mousse colorée en vert pour une bonne traçabilité du produit sur la peau, sur les poils des mains et des avant-bras. Efficacité incontestable en terme de disparition des poils. Ceux-ci repoussent dans un délais appréciable de trois semaines - comme le derme sous-jacent, dès lors que la sphère de mousse est désolidarisée des membres antérieurs du sujet. L'inocuité pour l'environnement est en revanche invalidée : vapeurs toxiques (dérivés chlorés), projections non maîtrisées dans un rayon de plusieurs mètres et dans les trois dimensions.



La photo pré-silicone a été pris par Laurent, de même que celle aux moustaches irisées.


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